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LE VECTEUR LIBRE ET INDEPENDANT LE VECTEUR LIBRE ET INDEPENDANT

 Création d'un emploi contractuel de conseiller en gestion par délibération

CONCLUSIONS PRONONCÉES PAR LAURENT TOUVET

Commissaire du gouvernement

NO 167514 - 167528 - 168350 - 168351 - 172647

Communauté de communes du pays de Laval

3éme et 5ème sous-sections réunies

Séance du 15 mai 1996

Lecture du 12juin 1996

Cette affaire intéressante vous conduira à interpréter la notion d' "Emploi contractuel", désormais présente à l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 issu de la loi du 27 décembre 1994 (dite loi Hoeffel).

La communauté de communes du pays de Laval, qui réunit 19 communes et 87 000 habitants, a été créée le 26 novembre 1993. Ce nouvel établissement public, qui résulte de la transformation d'un district, a décidé d'instaurer une taxe professionnelle unique sur l'ensemble de son territoire. Pour mettre en place ce nouvel outil, la communauté de communes a souhaité recruter un agent spécialisé dans la gestion et la fiscalité publiques. Elle a décidé de recruter un contractuel.

1. Une délibération prise par le bureau communautaire le 7 juillet 1994 a créé un "emploi contractuel de conseiller en gestion". Sur déféré préfectoral, le TA a prononcé le sursis à exécution de la délibération puis l'a annulée. La communauté de communes en relève appel respectivement sous les n°l67528 et 168350.

Le 12 août 1994, le président de la communauté de communes décidait de recruter Mme Delaroche dans cet emploi. Sur déféré préfectoral, le TA a prononcé le sursis à exécution de cette décision puis l'a annulée. Il en est fait appel respectivement sous les n°l67514 et 168351.

Le recrutement de l'agent étant un acte non réglementaire, l'appel du jugement relève en principe de la compétence de la cour administrative d'appel. Cependant, il nous semble de bonne administration de la justice, d'admettre la connexité entre la délibération créant l'emploi et la décision de recrutement dans cet emploi (cf. pour une connexité entendue largement : Ass., 26 novembre 1976, Soldani et autres, p.507 ; pour la connexité entre une décision réglementaire et une décision individuelle prise sur son fondement : 31 mars 1993, Estoup, p.687).

À la suite de ces jugements d'annulation, le bureau de la communauté de communes a repris la même délibération le 1er juin 1995, et son président a de nouveau recruté Mme Delaroche le 7 juin 1995. Le préfet a déféré ces actes au tribunal administratif qui en a aussi prononcé le sursis à exécution. Il en est fait appel sous les n° 172646 et 172647 enregistrés le 8 septembre 1995.

Ultérieurement, le TA a annulé la délibération et la décision de recrutement. Mais vous ne serez pas compétents pour connaître des appels probables contre ces jugements, qui seront enregistrés après le 1° octobre 1995 et seront donc jugés par la Cour administrative d'appel de Nantes. Puisqu'il n'y a pas connexité entre les conclusions tendant à l'annulation d'un acte administratif et des conclusions tendant au sursis à l'exécution de cet acte (5 décembre l994, Commune de la Roque-sur-Pernes et autres, p.537), vous pourrez juger maintenant les appels du sursis sans pouvoir attraire les appels sur le jugement au fond.

2. Vous avez donc à apprécier la légalité à la fois de la délibération créant un emploi contractuel et de la décision de recruter un contractuel dans cet emploi, avant et après l'intervention de la loi Hoeffel qui a ajouté à l'article 34 un second alinéa ainsi rédigé : " La délibération précise le grade ou, le cas échéant, les grades correspondant à l'emploi créé et, si l'emploi est créé en application des trois derniers alinéas de l'article 3, le motif invoqué, la nature des fonctions, le niveau de recrutement et de rémunération de l'emploi créé ".

Cette rédaction nous semble hérétique. Pour nous, il n'existe pas d'emploi contractuel : il n'existe pas d'emploi créé en application des trois derniers alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, mais seulement des emplois budgétaires qui sont ensuite pourvus, soit par des titulaires soit par des contractuels. D'ailleurs l'article 3 dispose notamment que les collectivités " peuvent recruter des agents non titulaires ", que " des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels ". Même si votre décision du 27 décembre 1995, Préfet de l'Essonne, p.112, a semblé valider la notion, ce ne sont jamais les emplois créés par délibération qui sont contractuels mais seulement les agents qui occuperont ces emplois.

Cette disposition a été introduite en décembre 1994 pour éviter, lorsque les autorités exécutives recourent au recrutement d'un contractuel en application des trois derniers alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, qu'elles ne disposent d'une trop grande latitude. Certes ces recrutements s'exercent sous l'œil vigilant du contrôle de légalité, mais le gouvernement a voulu, suivi par le Parlement, que ce contrôle de légalité puisse s'exercer le plus en amont possible, dès la délibération créant l'emploi. Ce nouvel alinéa de l'article 34, même maladroitement rédigé, ne résulte d'aucune volonté de créer une nouvelle catégorie d'emploi, mais seulement d'encadrer plus strictement les pouvoirs de l'exécutif lorsqu'il recrute un agent contractuel en application de l'article 3 de la loi.

Les critères posés par les trois derniers alinéas de cet article 3 ne prévoient aucune hypothèse où l'exécutif aurait l'obligation de recruter un contractuel ; il s'agit toujours d'une faculté : faire face à un besoin occasionnel ou saisonnier (2ème alinéa), absence de cadre d'emplois, ou nature des fonctions ou besoins du service (3ème alinéa), emplois à temps non complet dans des petites communes (4ème alinéa). Même l'hypothèse de la nature des fonctions n'exclut pas le recours à un fonctionnaire, qui pourrait être l'oiseau rare, spécialisé dans ce type de fonctions et que nulle disposition de la loi n'interdit de recruter.

Ni la loi ni les délibérations créant les emplois ne peuvent donc réserver certains emplois à des contractuels. Si des titulaires font l'affaire, la collectivité pourra les recruter.

La plus mauvaise solution nous semble donc être celle adoptée par le tribunal qui a annulé la délibération de juillet 1994 au motif, soulevé d'office après l'avoir régulièrement communiqué à la communauté de communes qui y a d'ailleurs répondu , qu'une collectivité ne pouvait pas (en juillet 1994) créer d'emploi contractuel, mais a dû admettre la création d'un tel emploi en juin 1995, après l'intervention de la loi Hoeffel.

Certes le TA a raison si on en reste aux termes littéraux de la loi et des délibérations, aussi mal rédigés l'une que les autres. Mais il nous semble meilleur de ne pas entretenir la confusion créée par la nouvelle rédaction de l'article 34, et de rétablir l'orthodoxie en interprétant les délibérations créant des " emplois contractuels comme des créations d'emplois pouvant le cas échéant, être pourvus par des contractuels et en précisant alors les conditions.

Malgré les termes de la délibération, aucun emploi ne peut être réservé à un contractuel. Nous vous proposerons donc d'adopter une interprétation neutralisante de ces termes en jugeant que là où est écrit " emploi contractuel ", il faut lire emploi pouvant être pourvu par un contractuel.

3. En poursuivant cette logique, vous serez amenés à vous demander si une délibération peut, dès la création de l'emploi, prévoir que l'emploi pourra être occupé par un contractuel. Ce serait illégal pour de très nombreux emplois. Mais pour un emploi de catégorie A, il reste toujours la faculté de , recruter un contractuel " si les besoins du service le justifient " (article 4 de la loi du 11 janvier 1984 auquel il est renvoyé par l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984). Et ces besoins du service peuvent tenir à l'impossibilité de recruter un fonctionnaire en raison de l'échec d'un appel à candidature resté infructueux pendant une certaine période (29.12.1995, préfet du Val d'Oise, n° 118654, à publier au recueil Lebon ; 20.3.1996, OPHLM de la communauté urbaine du Mans, n°l52651, à mentionner aux tables). Donc, pour un emploi de catégorie A, la délibération pourra toujours prévoir la faculté de recruter un contractuel. Les délibérations de la communauté de communes du pays de Laval, ainsi interprétées, ne sont donc pas illégales pour avoir prévu la création d'un emploi dit " contractuel ".

4. Pour en rester à l'examen de la légalité de la délibération créant l'emploi, vous apprécierez la légalité de l'indice de rémunération décidé par la communauté de communes : indice brut 991, intermédiaire entre ceux d'administrateur territorial hors classe 41 échelon et 51 échelon. Et seules les collectivités de plus de 80 000 habitants peuvent employer des administrateurs hors classe, et la communauté de communes du pays de Laval n'y est évidemment pas assimilable : ni son budget ni le nombre et les qualifications de ses agents ne le permettent.

Mais nous vous proposons cependant de juger légale cette référence. Trois arguments nous y conduisent :

- vous n'exercez qu'un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation (28 juillet 1995, Delisle, no84029, à publier au recueil). ;

- plus qu'en indice de référence, il nous semble qu'il faille raisonner en francs. Or si la rémunération des contractuels est définie par rapport à un indice, c'est seulement pour les faire bénéficier des augmentations générales prévues pour les fonctionnaires. Mais cette rémunération est nette de toute prime ou complément : les contractuels ne perçoivent ni le supplément familial de traitement, ni l'indemnité de résidence, ni aucune autre indemnité (prime de responsabilité par exemple). Un contractuel rémunéré à l'indice brut 991 majoré 800 perçoit donc environ 18 500 francs nets par mois, c'est à dire sensiblement moins qu'un fonctionnaire titulaire doté de ce même indice.

- enfin, et même si on peut le regretter, votre jurisprudence nous semble assez souple en la matière. Vous avez admis que le responsable de la stratégie de communication politique et institutionnelle " du Conseil général des Alpes maritimes soit rémunéré par référence au 60 échelon du grade d'administrateur territorial hors classe, soit 21 000 francs par mois (28 juillet 1995, Département des Alpes Maritimes, nol49801), et qu'un chargé de mission auprès du Conseil régional de Picardie soit rémunéré à l'indice brut 664, soit 12 200 francs par mois (28 juillet 1995, Delisle, préc.).

Si vous nous avez suivi jusque là, vous annulerez le jugement du TA de Nantes ayant annulé la délibération du 7 juillet 1994 créant l'emploi par la communauté de communes du pays de Laval.

5. Vous en viendrez alors à la décision de recruter Mme Delaroche dans cet emploi de "conseiller en gestion".Il nous semble qu'aucun des critères posés par l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 pour autoriser le recrutement d'un contractuel n'est rempli :

Il ne s'agit pas d'un emploi saisonnier ou occasionnel, contrairement à ce que prétend communauté de communes, qui rappelle qu'elle a été créée pour 8 ans renouvelables. Sinon, tous les emplois créés par des établissements publics seraient temporaires ; ces établissements publics étant toujours susceptibles d'une éventuelle mais improbable dissolution.

- les cadres d'emplois de la filière administrative sont aussi. prévus pour ces emplois plus spécialisés en gestion et en finances publiques;

- la nature des fonctions, abondamment discutée dans ce litige, ne peut pas être invoquée : mettre en place une taxe professionnelle unique ne requiert pas de compétences très spécialisées: contrairement à ce que prétend la communauté de communes, il s'agit plutôt de fonctions de généraliste. Gérer un système fiscal local est une tâche qui n'est pas inconnue des fonctionnaires territoriaux et ne nécessite pas de faire appel à des contractuels. Beaucoup de collectivités autrement plus importantes et complexes que la communauté de communes du pays de Laval gèrent leur fiscalité grâce à des agents titulaires, sans qu'on dise qu'elles devraient au contraire faire appel à des spécialistes de la comptabilité privée.

- les besoins du service ne sont pas démontrés par la communauté de communes. À notre sens, les besoins du service recouvrent deux hypothèses : soit l'intuitu personae qui procurerait un avantage déterminant, notamment dans le cas du renouvellement d'un contrat, soit l'impossibilité du recrutement d'un fonctionnaire, faute de candidats adéquats. Ici, seule la seconde hypothèse est à examiner, la délibération créant l'emploi ayant été votée le 7 juillet et Mme Delaroche recrutée le 12 août. La situation peut être regardée sous deux angles différents :

Le premier, en considérant que la collectivité recherchait un agent depuis plusieurs mois, en fait depuis la création le 17 février d'un autre emploi, pour lequel elle avait lancé un avis de vacance et publié deux petites annonces en mars 1994. Et ce serait parce qu'elle n'avait trouvé aucun fonctionnaire pour cet emploi de directeur financier que la collectivité a modifié la définition de son emploi pour l'appeler " emploi contractuel de conseiller en gestion " et recruter cet agent.

Le second en appréciant le délai de cinq semaines seulement entre la création de l'emploi et le recrutement, insuffisant pour justifier les besoins du service à pourvoir l'emploi sans délai, ce que n'allègue d'ailleurs même pas la collectivité appelante. Ce second angle nous semble le seul acceptable: l'emploi doit être créé d'abord, puis les avis de vacance publiés, enfin le recrutement effectué. Le recrutementdes agents publics étant empreint d'un certain formalisme, vous ne pouvez pas accepter que des collectivités lancent des avis de vacance et cherchent des fonctionnaires alors que l'emploi n'existe pas encore. Ce n'est qu'à partir de la date de création de l'emploi que vous apprécierez les difficultés éventuelles de recherche d'un fonctionnaire pour admettre ou non le recrutement d'un contractuel en vertu des " besoins du service ". Sinon les collectivités risquent de ressortir des petites annonces parues des mois ou des années auparavant pour des emplois voisins mais différents, ce qui validerait à l'excès de prétendues impossibilités de recrutement de fonctionnaires.

Aucun critère de recrutement d'un contractuel n'étant rempli, nous vous proposons donc de confirmer l'annulation de la décision du 12 août 1994 de recruter Mme Delaroche.

6. Pour terminer, il vous reste à vous prononcer sur l'appel des deux jugements par lesquels le TA de Nantes a prononcé le sursis à exécution de la nouvelle délibération et de la nouvelle décision de recruter le même agent, actes identiques mais postérieurs à la loi du 27 décembre 1994.

Le TA s'est fondé à la fois sur ce que l'emploi en cause est en réalité un emploi permanent annulé précédemment par le tribunal, et que ni les besoins du service ni la nature des fonctions ne sont établis. Le sursis à exécution de la décision de recrutement a été prononcé, par voie de conséquence, sur le fondement du moyen sérieux tiré de l'illégalité de la délibération.

a) En ce qui concerne la délibération, aucun moyen dirigé contre elle ne nous semble sérieux et de nature à justifier son annulation :

- il n'y a pas de violation de l'autorité de la chose jugée, même si la délibération du 1er juin 1995 est identique à celle du 7 juillet 1994. Entre la première et la deuxième délibérations est intervenue la loi du 27 décembre 1994 qui a modifié, sans le bouleverser nous l'avons dit-, la base légale sur laquelle a été prise la délibération (17 juin 1974, ministre des Transports c/Sieur Plas, p.344). - de même que pour la délibération de juillet 1994, vous avez vu que la délibération peut prévoir la création d'un emploi de catégorie A pourvu par un contractuel, dès lors que le critère tiré des besoins du service peut s'avérer rempli ultérieurement ;

- il n'y a pas non plus d'erreur manifeste d'appréciation à recruter à l'indice brut 991, pour les mêmes raisons que nous vous avons précédemment exposées.

Aucun moyen soulevé par le préfet à l'encontre de la délibération du 1er juin 1995 n'étant susceptible d'entraîner son annulation, vous annulerez le jugement du TA et le déféré préfectoral présenté devant ce tribunal.

b) En ce qui concerne la décision de recrutement du 7 juin 1995, il faut s'écarter du raisonnement du TA qui a prononcé le sursis par voie de conséquences du sursis à exécution de la délibération. Vous confirmerez en revanche ce jugement de sursis, puisque d'abord la communauté de communes s'est fondée sur la nature des fonctions pour recruter à nouveau Mme Delaroche, et qu'ensuite nous vous avons déjà dit pourquoi ces fonctions nous semblent pouvoir être remplies avec efficacité par des fonctionnaires, excluant le motif tiré de la nature des fonctions, et qu'enfin le recrutement a eu lieu 6 jours seulement après la création de l'emploi, excluant le motif tiré des besoins du service.

Finalement, nous vous proposons d'accorder à la communauté de communes une somme de 5 000 francs sur les 15 000 qu'elle demande au titre des frais irrépétibles.

Et par ces motifs, nous concluons

- sous le no168350 et 172646, à l'annulation des jugements du TA de Nantes et au rejet des déférés présentés par le préfet de la Mayenne devant ce même tribunal ;

- à la condamnation de l'État à verser une somme de 5 000 francs à la communauté de communes du pays de Laval au titre de la loi du 10 juillet 1991 ;

- au rejet des requêtes enregistrées sous les n°168351 et 172647;

- à ce que vous jugiez qu'il n'y a pas lieu à statuer sur les appels enregistrés sous les n° 167528 et 167514.

DÉCISION DU CONSEIL D'ÉTAT

Séance du 15 mai 1996

Lecture du 12 juin 1996

Le Conseil d'État statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 30 et 50 sous-sections réunies),

Sur le rapport de la 31 sous-section de la Section du Contentieux,

Vu 1°), sous le no 167514, l'ordonnance du 27 février 1995, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État le 28 février 1995, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes transmet au Conseil d'État, en application de l'article R. 7 du code des tribunaux administratif et des cours administratives d'appel, le dossier de la requête présentée à cette cour par la communauté de communes du Pays de Laval.

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 1994 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présentée par la communauté de communes du Pays de Laval, représentée par son président en exercice ; la communauté de communes du Pays de Laval demande:

1 - l'annulation du jugement du 29 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Nantes a ordonné, sur déféré du préfet de la Mayenne, qu'il soit sursis à l'exécution de la décision du 12 août 1994 par laquelle son président a décidé de passer un contrat recrutant Mme Valérie Delaroche en qualité de conseiller en gestion pour 3 ans à compte du 11 septembre 1994;

2 - le rejet des conclusions à fin de sursis présentées par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes

Vu 2°), sous le no 167 528, l'ordonnance du 27 février 1995, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État le 28 février 1995, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes transmet au Conseil d'État en application de l'article R. 73 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le dossier de la requête présentée à cette cour par la communauté de communes du Pays de Laval.

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 1994 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présentée par la communauté de communes du Pays de Laval représentée par son président en exercice,, la communauté de communes du Pays de Laval demande:

1 - l'annulation du jugement du 29 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Nantes a ordonné, sur déféré du préfet de la Mayenne, qu'il soit suris à l'exécution de la délibération du 7 juillet 1994 par laquelle le bureau communautaire a décidé la création d'un emploi contractuel de conseiller en gestion pour 3 ans à compter du 1er septembre 1994;

2 - le rejet des conclusions à fin de sursis présentées par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes

Vu 3°), sous le no 168 350, la requête, enregistrée le 31 mars 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État, présentée pour la communauté de communes du Pays de Laval, représentée par son président en exercice ; la communauté de communes du Pays de Laval demande au Conseil d'État

1° d'annuler le jugement du 7 février 1 995 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, sur déféré du préfet de la Mayenne, annulé la délibération du 7 juillet 1994 par laquelle le bureau communautaire a décidé la création d'un emploi contractuel de conseiller gestion pour 3 ans à compter du 1er septembre 1994 ;

2° de rejeter le déféré présenté par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes

Vu 4°), sous le no 168 351, la requête, enregistrée le 31 mars 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'état présentée pour la communauté de communes du Pays de Laval, représentée par son Président en exercice: la communauté de communes du Pays de Laval demande au Conseil d'état :

 

1° d'annuler le jugement du 7 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, sur déféré du préfet de la Mayenne, annulé la décision du 12 août 1994 par laquelle son président a décidé de passer un contrat recrutant Mme Valérie Delaroche en qualité de conseiller en gestion pour 3 ans à compter du 1er septembre 1994

2° de rejeter le déféré présenté par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes;

Vu les autres pièces des dossiers:

Vu la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée par la loi no 87-588 du 30 juillet 1987

Vu la loi no 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée par la loi no 87-529 du 13 juillet 1987 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel

Vu l'ordonnance no 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret no 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987;

Après avoir entendu en audience publique

- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'État,

Considérant que les requêtes susvisées sont relatives au même litige , qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la requête no 168350:

Considérant qu'aux termes du 3° alinéa de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les mêmes cas et selon les mêmes conditions de durée que ceux applicables aux agents de l'État " et qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État : des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants :

1° lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'occuper les fonctions correspondantes;

2° pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient ; "

Considérant que si ces dispositions n'autorisent pas les organes délibérants de collectivités territoriales à créer des emplois permanents exclusivement réservés à des agents contractuels, elles ne leur interdisent pas de préciser que les emplois permanents qu'ils créent sont susceptibles d'être occupés par de tels agents et de fixer les conditions de leur recrutement; que la communauté de communes du Pays de Laval par sa délibération du 7 juillet 1994 créant un - emploi contractuel de catégorie A de conseiller en gestion -, doit être regardée comme ayant seulement entendu préciser que cet emploi pouvait être occupé par un agent contractuel; que la communauté de communes du Pays de Laval est, par suite fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler ladite délibération, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur la circonstance que ledit emploi aurait été exclusivement destiné à être occupé par un agent contractuel ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes;

Considérant, d'une part qu'il résulte des dispositions législatives précitées que les emplois permanents de catégorie A peuvent être occupés par des agents contractuels notamment lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient; que, par suite, le bureau de la communauté de communes du Pays de Laval a pu légalement préciser que l'emploi de conseiller en gestion créé par la délibération du 7 juillet 1994, qui ainsi qu'il a été dit, un emploi de catégorie A était susceptible d'être occupé par un agent contractuel ;

Considérant, d'autre part, qu'eu égard à la qualification requise pour exercer les fonctions afférentes à cet emploi, le bureau de la communauté n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en décidant que l'agent contractuel susceptible de l'occuper percevrait rémunération afférente à l'indice 991 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la communauté de communes du Pays de Laval est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la délibération de son bureau du 7 juillet 1994 ;

Sur la requête no 168351:

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que c'est à tort que le tribunal a annulé la décision du 12 août 1994 du président de la communauté de communes du Pays de Laval recrutant Mme Delaroche sur l'emploi de conseiller en gestion par voie de conséquence de l'annulation de la délibération du 7 juillet l994 ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'État, saisi par l'effet dévolutif l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le préfet de la Mayenne à l'appui de son déféré;

Considérant que les fonctions afférentes à l'emploi de conseiller en gestion consistent à organiser un service financier chargé notamment de la mise en place d'une taxe professionnelle unique sur l'ensemble du territoire de la communauté ainsi que d'une comptabilité analytique et d'assurer le suivi de cette dernière peuvent être assurées par un agent du cadre d'emplois des attachés territoriaux ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que le recrutement d'un agent contractuel pour occuper ces fonctions soit justifié par leur nature ou par les nécessités du service ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la communauté de communes du Pays de Laval n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 12 août 1994 de recruter Mme Delaroche par contrat pour occuper l'emploi de conseiller en gestion ;

Sur les requêtes n°s 167514 et 167528:

Considérant que la présente décision statuant définitivement sur la légalité la délibération de la Communauté de communes du Pays de Laval 7 juillet 1994 et de la décision de son président du 12 août 1994, les conclusions des requêtes de la communauté de communes du Pays de Laval dirigées contre les jugements du 29 novembre 1994 par lesquels le tribunal a prononcé le sursis à l'exécuton de ces actes devenues sans objet;

Décide

Article 1- Il n'y a pas lieu de statuer sur les requêtes n°167514 et 167528.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 juillet 1995 annulant la délibération de la communauté de communes du Pays de Laval est annulé.

Article 3 : Le déféré du préfet de la Mayenne tendant à l'annulation de la délibération du 7 juillet 1994 est rejeté.

Article 4 : La requête no 168351 de la communauté de communes du Pays de Laval est rejetée.

Sur le rapport de la 3e sous-section, de la Section du Contentieux,

- Vu la requête enregistrée le 8 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État présentée pour la Communauté de communes du Pays de Laval, représentée par son- président en exercice, à ce dûment habilité ; la Communauté de communes du Pays de Laval demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler le jugement du 23 août 1995 par lequel le tribunal administratif de Nantes a ordonné, sur déféré du préfet de la Mayenne, le sursis à exécution de la délibération du 1er juin 1995 par laquelle le bureau communautaire a décidé la création d'un emploi contractuel de conseiller en gestion pour trois ans;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi no 82-213 du 2 mars 1 982

Vu la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée par la loi no 87-588 du 30 juillet 1987 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée, notamment, par la loi no 87-529 du 13 juillet 1987 et la loi no 94-1134 du 27 décembre 1994;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance no 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret no 53-934 du septembre 1953 et la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'État,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la Communauté de communes du Pays de Laval, - les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aucun des moyens invoqués par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes à l'appui de son déféré dirigé contre la délibération du bureau de la Communauté de communes du Pays de Laval du 1er juin 1995 créant un emploi de conseiller en gestion ne présente un caractère de nature à justifier l'annulation de cette délibération ; que dès lors la Communauté de communes du Pays de Laval est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 23 août 1995, le tribunal administratif de Nantes a prononcé le sursis a l'exécution de cette délibération ;

Décide :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 août 1995 est annulé.

Article 2 : Les conclusions du préfet de la Mayenne tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de la délibération du 1er juin 1995 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Communauté de communes du Pays de Laval, au préfet de la Mayenne et au ministre de l'intérieur.

- Vu la requête enregistrée le 8 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État présentée pour la Communauté de communes du Pays de Laval, représentée par son président en exercice, à ce dûment habilité ; la Communauté de communes du Pays de Laval demande au Conseil d'État:

1°) d'annuler le jugement du 23 août 1995 par lequel le tribunal administratif de Nantes a ordonné, sur déféré du préfet de la Mayenne, le sursis à exécution de la décision du 7 juin 1995 par laquelle son président a décidé de passer un contrat recrutant Mme Valérie Delaroche en qualité de conseiller en gestion pour trois ans à compter du 7 juin 1995 ;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de la Mayenne devant le tribunal administratif de Nantes ;

Considérant que le moyen présenté par le préfet de la Mayenne devant tribunal administratif de Nantes à l'appui de son déféré dirigé contre la décision du président la Communauté de communes du Pays de Laval du 7 juin 1995 recrutant par contrat Mme Delaroche en qualité de conseiller de gestion et tiré de ce que le recrutement d'un agent contractuel pour occuper l'emploi correspondant, qui peut être occupe par un agent du cadre d'emplois des attachés territoriaux, n'est justifié ni par la nature des fonctions ni par les nécessités du service, présente un caractère de nature à justifier l'annulation de cette décision ; que la Communauté de communes du Pays de Laval n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a prononcé le sursis à l'exécution de cette décision ;

Article 1-: La requête de la Communauté de communes du Pays de Laval rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Communauté de communes du Pays de Laval, à Mme Valérie Delaroche, au préfet de la Mayenne et au ministre de l'intérieur.

 

 


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